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Cette fois-ci c’était la vidéo de trop. Je pensais que cette mode allait peu à peu s’étioler à force de prouver son inefficacité. Mais non, j’ai encore vu une vidéo où sous prétexte de « détente », des pantins désarticulés tombent au moindre contact sans raison biomécanique effective, gigotent et s’ébrouent tels des marshmallows fondus et s’effondrent déstructurés en bons et dociles pratiquants de Systema.

Lorsque les raisons martiales d’un principe ou d’une technique sont oubliées, elles sont sujettes à multiples interprétations plus ou moins heureuses, plus ou moins mystiques voir mystifiantes, plus ou moins proches de la réalité du combat.

Il est vrai que la détente est l’un des principes essentiel du Systema. Faut-il aussi en connaitre la raison.

A l’origine le Systema a été élaboré par et pour des militaires. Il n’y avait donc aucune notion de bien-être ou de développement personnel alliée à ce principe. S’il était utilisé dans ce milieu, c’était uniquement à cause de son efficacité martiale.

Quels sont alors les fondements de la détente dans un contexte martial ?

  • L’économie d’énergie.
    Les militaires doivent pouvoir se battre sur une très longue durée (parfois plusieurs jours sans interruption), dans des circonstances extrêmement contraignantes. S’ils dispensent leur énergie en quelques instants, ils ne peuvent pas continuer leur travail. C’est une question de survie. Encore une fois ce n’est pas une question de relaxation ou de développement personnel. La détente et l’absence de tension non nécessaire à l’action permettent de préserver son énergie.
  • L’utilisation de la force de l’adversaire.
    Dans un rapport d’opposition de forces ( force contre force ), deux forces luttent l’une contres l’autre, et bien souvent, à moins que l’un des protagonistes ne fasse preuve d’une technicité particulière, c’est la force musculaire brute et le rapport de masse qui va faire la différence. c’est d’ailleurs pour cela qu’il y a des combats par catégories dans les sports de combat.
    La détente permet de laisser passer la force de l’adversaire plutôt que de s’y opposer. De ce fait le protagoniste se sert de la force de son adversaire pour construire sa défense et le déséquilibrer, annulant ainsi en partie le rapport de masse. Ce qui nous amène naturellement au point suivant:
  • L’absence de point d’appui.
    En laissant passer la force de l’adversaire, le pratiquant ôte tout point d’appui sur lequel son adversaire pourrait construire son attaque. Celui-ci se trouvera dans un environnement mouvant et déstabilisant, sans support pour canaliser et orienter sa force à bon escient.
  • La maîtrise de soi.
    L’utilisation de la détente physique et psychologique lors d’une confrontation  permet de rester lucide, conscient et de retarder le fameux « effet tunnel » du à l’afflux d’adrénaline  plus longtemps, donnant ainsi la possibilité d’élaborer une stratégie ou à défaut une attaque.
    L’aspect psychologique de la détente permet aussi, dans certaines circonstances, de désamorcer un conflit avant qu’il ne dégénère: nous avons tous probablement vécu une situation où notre interlocuteur ou nous-même n’avons pu continuer d’alimenter un conflit car l’un de nous ne donnait aucun point d’appui, aucun support psychologique pour nourrir celui-ci.

 

La détente comme principe martial pourrait être résumée ainsi : le fait de n’utiliser que la tension nécessaire à l’action (pas plus, mais pas moins non plus).
Essayer d’éliminer toute tension dans un rapport martial est non seulement absurde (un être vivant ne peut pas vivre sans tension, ne serait-ce que le fait de marcher en génère), mais d’autre part est dangereux pour le pratiquant s’il pense pouvoir se protéger de tout ainsi.

Claire Petr